Dire non à l'informatique injuste, même une seule fois, est une aide
par Richard StallmanUn malentendu circule selon lequel le projet GNU vous demanderait d'utiliser du logiciel 100% libre, tout le temps. Que ce soit moins (90%?), et nous vous dirons d'aller vous faire voir, disent-ils. Rien n'est plus éloigné de la vérité.
Notre but final est la liberté numérique pour tous, un monde sans logiciel privateur. Certains d'entre nous, qui avons fait de la campagne pour la liberté numérique notre but, rejettent tous les logiciels privateurs. Toutefois, en pratique, même un petit pas dans cette direction est bon à prendre. Une marche d'un millier de kilomètres est faite de nombreux pas. Chaque fois que vous n'installez pas un logiciel privateur, ou que vous décidez de ne pas l'utiliser ce jour-là, vous faites un pas vers votre propre liberté. Chaque fois que vous refusez d'utiliser un logiciel privateur avec d'autres, vous leur donnez un sage exemple de pensée à long terme. C'est un pas vers la liberté pour le monde.
Si vous êtes pris dans une toile de logiciels privateurs, vous cherchez sans doute un moyen d'en retirer quelques fils de votre corps. Chaque fois que vous en enlevez un, vous avancez.
Chaque fois que vous dites à des gens au cours d'une activité « Je préférerais utiliser Zoom un peu moins, ne comptez pas sur moi aujourd'hui », vous aidez le mouvement du logiciel libre. « J'aimerais participer, mais avec Zoom dans la balance, j'ai décidé de ne pas le faire. » Si vous avez déjà donné votre accord, vous pouvez dire : « Je veux bien participer, mais le logiciel que nous utilisons n'est pas bon pour nous. J'ai décidé de prendre mes distances. » De temps en temps, vous pourriez les convaincre de le remplacer par du logiciel libre. Au moins ils prendront conscience que certaines personnes se soucient assez de la liberté pour refuser de participer, pour le bien de la liberté elle-même.
Si vous dites non, une fois, à une conversation sur Skype avec une personne ou un groupe, vous apportez votre aide. Si vous dites non, une fois, à une conversation via WhatsApp, Facebook, ou Slack, c'est de l'aide. Si vous dites non, une fois, à l'édition de quelque chose sur Google Docs, c'est de l'aide. Si vous dites non à une prise de rendez-vous sur eventbrite.com ou meetup.com, c'est de l'aide. Si vous dites à une organisation que vous n'utiliserez pas son « portail » ou son application, que vous préférez mener votre affaire par téléphone, c'est encore de l'aide. Bien sûr, vous aidez davantage en refusant systématiquement (avec une fermeté bienveillante, évidemment) et en ne laissant pas les autres vous influencer.
Les refus s'additionnent. Si un autre jour vous refusez à nouveau ce programme privateur, vous aurez aidé à nouveau. Si vous dites non plusieurs fois dans la semaine, votre refus se renforce dans la durée. Quand les gens vous voient dire non, même une seule fois, cela peut les inciter à suivre votre exemple.
Pour être constant dans votre aide, vous pouvez faire de ce refus une pratique systématique, mais un refus occasionnel est toujours de l'aide. Vous aiderez davantage si vous refusez quelques-uns des programmes privateurs dont les communautés se gavent aveuglément. Est-ce qu'un jour vous voudrez tous les refuser ? Vous n'avez pas à le décider maintenant.
Par conséquent, dites à quelqu'un : « Merci de m'avoir invité, mais Zoom (ou Skype, ou Whatsapp, ou autre) est un programme liberticide, qui épie ses utilisateurs ; merci de ne pas compter sur moi. Je veux vivre dans un monde différent, et en refusant d'utiliser ce programme aujourd'hui, je fais un pas dans ce sens. »
La FSF recommande des méthodes respectueuses des libertés pour les types de communication que permettent ces systèmes injustes. Si l'une de ces méthodes est envisageable, vous pouvez peut-être ajouter « Si nous avions cette conversation sur XYZ, ou n'importe quel autre logiciel libre, je pourrais me joindre à vous. »
Vous pouvez commencer par un premier pas. Et lorsque vous l'aurez réalisé, tôt ou tard vous pourrez en faire un autre. En fin de compte, vous constaterez peut-être que vos habitudes ont changé ; et si vous vous habituez à dire non à un programme privateur, vous pourrez le faire la plupart du temps, peut-être même systématiquement. Non seulement vous aurez gagné en liberté, mais vous aurez également aidé votre communauté en lui faisant prendre conscience de cet enjeu.